Les Cinéastes de L’ARP tiennent tout d’abord à saluer le retour du pavillon de l’Algérie au Marché du Film du 77ème Festival de Cannes, après plusieurs années d’absence. Ce Festival, véritable vitrine culturelle, offre une visibilité cruciale au cinéma mondial dans toute sa diversité. Nous souhaitons ainsi aux invités du pavillon Algérie des échanges et rencontres fructueux.

Ce retour a lieu alors que l’Algérie vient récemment d’adopter une loi relative à l’industrie cinématographique (parue au Journal Officiel le 2 mai 2024).

Si certaines mesures nous semblent constructives, comme le soutien de l’État à la production, les mesures incitatives aux investisseurs dans le domaine du cinéma ou encore la promotion de la formation, les Cinéastes de L’ARP tiennent toutefois à exprimer leur profonde inquiétude au sujet des articles 4 et 73 qui prévoient des sanctions pénales pour les acteurs du secteur (production, réalisation, distribution et exploitation) dans le cas où une œuvre cinématographique porterait atteinte, par exemple, aux « valeurs et constantes nationales ». Selon cet article 4, le cinéma « s’exerce librement » mais à de nombreuses conditions.

Par ailleurs, les films « se rapportant aux thèmes religieux, aux évènements politiques, aux personnalités nationales et aux symboles de l’Etat [sont] soumis à l’avis consultatif des institutions concernées » (article 5).

Les notions de « valeurs et constantes nationales » ainsi que les « symboles de l’État » étant extrêmement vagues, ces articles engendrent une atmosphère de suspicion et semblent clairement relever d’une volonté de censure.

En exposant les cinéastes à des sanctions allant d’un à trois ans d’emprisonnement et une amende d’un à deux millions de dinars, ces articles mettent en péril la liberté de création et apparaissent comme résolument liberticides.

Dans ce contexte, les Cinéastes de L’ARP, conscients que la liberté de création est indispensable à la vitalité d’un cinéma national fort, universel et rayonnant au-delà de ses propres frontières, tiennent à apporter tout leur soutien aux cinéastes algériennes et algériens, ainsi qu’aux différents acteurs du secteur, et appellent de leurs vœux le maintien d’un cinéma algérien indépendant et libre, à l’image de Tahia ya Didou (1971) de Mohamed Zinet et plus récemment, La Dernière Reine (2023) d’Adila Bendimerad et Damien Ounouri, pour ne citer qu’eux.

Les Cinéastes de L’ARP