Le 25 avril 2018,

Le jeudi 12 avril dernier, L’ARP et le Cinéma des Cinéastes accueillaient une discussion intitulée Quelle place pour les femmes dans la culture et le cinéma ? Cette rencontre était animée par Daniela Elstner (Présidente Directrice Générale de Doc & Film et Présidente de l’ADEF) en présence de Jackie Buet (Directrice du Festival de films de femmes de Créteil), Dominique Cabrera (Cinéaste), Frédérique Dumas (Députée de la 13ème circonscription des Hauts-de-Seine), Marie-Castille Mention-Schaar (Cinéaste), Radu Mihaileanu (Cinéaste et Président de L’ARP), Anne Seibel (Cheffe décoratrice) et Béatrice Thiriet (Compositrice).

Depuis plusieurs mois, dans le monde entier, des femmes et des hommes se mobilisent afin de dénoncer les comportements abusifs rencontrés dans les secteurs du cinéma, de la culture et de la société toute entière. Cet élan sans précédent a fait naître une prise de conscience et des pistes d’évolutions, quant à la place et à la reconnaissance des femmes dans les milieux professionnels. Ce débat en a été l’une des nombreuses illustrations : en voici quelques extraits.

Frédérique Dumas a formulé plusieurs voies de réformes : « Les obligations de progression quantitatives assorties de mesures de suivi et d’évaluation doivent être systématisées (nominations, composition des commissions et des jurys…) ; les aides publiques doivent être conditionnées à l’atteinte de tels objectifs ; la prise de conscience doit être encouragée avec l’évaluation faite par les acteurs de la culture eux-mêmes dans leurs propres structures ; la sensibilisation, la lutte contre les stéréotypes doivent intervenir dès le plus jeune âge et doivent faire partie de toutes les réformes qui touchent l’orientation, la formation, l’alternance, l’apprentissage ; l’audiovisuel public doit être le fer de lance de cette ambition. »

Jackie Buet a défendu le principe – clivant – des quotas : « En s’appuyant sur les quotas nous pourrons enfin améliorer la situation des femmes dans le cinéma, au niveau de la production et d’un soutien à un plus grand nombre de leurs projets (aujourd’hui à peine 20% de leurs films sortent en salle) et avec des budgets adaptés à leurs ambitions. Il faudra aller plus loin et sanctionner au niveau des financements en permettant la mise en place de bonus/malus des financements publics, selon la place des femmes dans les projets financés. »

Il lui paraît tout aussi essentiel que « la critique cinématographique, les comités de sélection des grands festivals changent leur regard, leur manière de voir. »

Dominique Cabrera a également plaidé pour la parité d’ici 2020 dans les institutions culturelles, les festivals, les jurys : « Si on se contente de poursuivre les courbes, on peut espérer une amélioration peut-être d’ici une centaine d’années. Il vaudrait mieux agir d’une façon décisive d’ici-là » et pour que la pluralité soit mieux représentée : « Il faut enrichir notre culture, notre cinéma, de la diversité des points de vue, des origines sociales et culturelles, ouvrir les portes au lieu de les fermer. »

Dominique Cabrera a proposé de créer un observatoire de l’égalité dans l’industrie audiovisuelle et cinématographique, qui permette de faire apparaitre la disparité des salaires, des budgets de production et d’exploitation des films : « Quand je réalise un film, je suis à la fois une femme, un homme, le vent, du plein et du vide, le soleil, les personnages, le rythme, la couleur, les formes, tout et rien, une force, une concentration, mais au stade de son financement et de son exploitation, je suis ramenée à la place dévolue aux femmes dans notre industrie : la portion congrue. »

Anne Seibel a souligné la nécessité d’intégrer à la formation des futurs professionnels une forme de  pédagogie : « Le changement passe par l’éducation, la transmission de valeurs. A la Fémis,  j’essaie de faire passer des messages, de transmettre une expérience qui est la mienne, de faire respecter la parité, le respect de l’autre et de son travail quel qu’il soit. Curieusement, le nombre de candidates reçues au deuxième tour du concours dépasse largement celui des candidats, mais combien sont-elles, après quelques années d’expérience, à rester cheffe décoratrice ? Il serait vraiment bien qu’à ce chantier se greffent des hommes qui comprennent les femmes et assument de les défendre. »

En association avec les structures existantes depuis longtemps mobilisées sur ces questions, les Cinéastes de L’ARP continueront de prendre part à ce débat et proposeront un point d’étape sur ce sujet essentiel, lors des prochaines Rencontres Cinématographiques de Dijon, qui se tiendront du 7 au 9 novembre prochain sous la présidence de Cristian Mungiu.